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Le Bic

Le Bic | Photo : Pascal Huot

Ranimer son coeur de ville ou de village

Au cœur de nos villes et de nos villages se trouve la majorité des éléments qui déterminent l’identité de nos milieux bâtis. Quels facteurs participent à une mise en valeur réussie de ces secteurs anciens ?

Le succès d’un projet de revitalisation et de mise en valeur d’un quartier historique ou d’un noyau villageois nécessite l’élaboration d’une démarche structurée et concertée. Il ne suffit pas de recueillir et d’analyser les bonnes données. Il faut d’abord et avant tout réunir l’ensemble des intervenants concernés autour d’un enjeu commun, les amener ensuite à échanger des idées, puis à partager des objectifs à atteindre. Le but ultime : faire en sorte qu’ils se perçoivent comme de véritables partenaires du projet. Quatre facteurs clés participent à la réussite d’une telle entreprise : la collaboration et la concertation entre les intervenants, la recherche d’un bon équilibre des activités socio-économiques, le renforcement et la valorisation de la vie sociale et communautaire, et finalement, la mise en valeur du patrimoine.

Concerter les acteurs

Il est d’abord primordial de créer des conditions favorables au développement d’un climat de collaboration entre les intervenants. Il s’agit de susciter la concertation des gens impliqués dans le projet, de gagner leur confiance et de soutenir leur mobilisation. Par exemple, on mettra en place un processus décisionnel impliquant tous les partenaires. On veillera aussi à la bonne gestion des relations entre eux tout au long du processus. Et on assurera un suivi efficace des étapes de réalisation de la démarche en attribuant des responsabilités à chacun des représentants des différents groupes d’intérêt.

Le secret est de savoir regrouper et faire travailler ensemble tous les intervenants qui peuvent jouer un rôle à l’une ou l’autre des étapes du projet. Il est aussi important que le comité, mis sur pied pour mener à bien la revitalisation ou la relance du secteur, soit représentatif du milieu, et que le travail soit fait dans le respect et la valorisation de chacun de ses membres.

Qui mettra en œuvre une telle collaboration entre citoyens, gens d’affaires, élus et employés municipaux, organismes économiques et sociocommunautaires ? Un agent de développement, engagé pour coordonner la réflexion et le travail des acteurs du milieu, représente un des ingrédients essentiels d’une démarche fructueuse. Il créera le comité de concertation, contribuera à l’avancement de certaines actions en son nom et jouera un rôle déterminant dans la mise en place d’un climat de confiance entre tous les partenaires. Cela, en privilégiant un échange constant d’informations et d’idées entre ces derniers tout en demeurant à l’écoute des besoins de chaque groupe d’intérêt.

Indépendamment de l’origine d’une idée, sans parti pris, ce coordonnateur invitera tous les gens et les organismes concernés par l’action proposée à y participer. Le développement du projet deviendra la responsabilité de tout un chacun.

Enfin, le responsable ne cherchera pas à imposer sa vision. Il tentera plutôt de susciter le plus d’idées possible, de laisser les partenaires définir leur projet en mettant à profit son expérience et de créer des consensus autour d’objectifs et d’actions possibles.

Répondre aux besoins

La valorisation de nos cœurs de municipalités passe par le regroupement et l’équilibre des activités socio-économiques en leur centre. Pour ce faire, la révision de la réglementation d’urbanisme – afin de contrer l’étalement urbain et d’encourager la localisation des commerces et des services dans les secteurs centraux – est souvent nécessaire. Il importe également que ces centres-villes ou ces centres de villages répondent aux besoins de différents types de clientèles. Pour définir cette diversité commerciale idéale, il faut dresser un état de la situation et identifier quel est le potentiel de développement pour chaque catégorie et chaque type de commerces et de services.

Puis, cette diversité idéale servira de référence pour comparer la structure commerciale présente afin d’en évaluer les forces et les carences. À partir des faiblesses identifiées, on élaborera la stratégie de développement et de recrutement commercial. Cette dernière aura pour but de proposer des mesures appropriées afin de faire connaître la structure actuelle des commerces et services, de les valoriser et de les promouvoir. Elle annoncera aussi le type de nouveaux commerces et services recherchés qui viendront améliorer le mix actuel afin de mieux répondre aux besoins et aux attentes des clientèles locales. La stratégie n’invite pas à contrôler le marché, mais davantage à influencer le cours des choses. Les besoins et les potentiels étant ainsi bien identifiés, les promoteurs éventuels, mieux informés et guidés, seront plus à même de répondre aux attentes locales et pourront venir combler des manques.

Le coordonnateur du projet sera au cœur de ce processus d’identification des besoins et des potentiels. Il veillera à partager avec les partenaires les données recueillies et les possibilités de développement de nouveaux commerces et services.

Favoriser la vitalité socioculturelle

Autre ingrédient de succès : le renforcement et la promotion de la vie sociale et communautaire du milieu.  Une façon d’afficher ses couleurs et de renforcer la fierté de vivre dans ce milieu.

On cherchera, par exemple, à développer et à mettre en œuvre des activités d’animation qui inciteront les citoyens à fréquenter leur milieu, à en découvrir tous les attraits et à apprécier sa qualité de vie. On s’appliquera à bien accueillir et à servir les différentes clientèles en améliorant les façons de faire pour offrir des expériences humaines enrichissantes. On établira un plan de communication afin de faire connaître le milieu, ses attraits, ses commerces et services. On diffusera également, de façon continue, les bonnes informations aux partenaires, aux citoyens et aux visiteurs. On organisera des campagnes de promotion collectives des commerces et services afin de contribuer à la fréquentation du milieu et à l’offre d’expériences d’achat uniques. On emploiera des outils de communication écrits et électroniques, mis à jour régulièrement, pour garder les différents utilisateurs bien informés. On interpellera les gens d’affaires afin d’offrir aux clientèles des heures d’ouverture concertées qui répondent adéquatement aux besoins.

En somme, il faut marquer le territoire, c’est-à-dire informer et communiquer régulièrement ; mettre en marché efficacement ; sécuriser et faciliter les déplacements ; susciter la confiance en faisant la promotion d’une image positive et cohérente !

Miser sur l’identité

Le patrimoine se définit comme tout ce qui caractérise l’image et l’identité d’une municipalité. Il représente donc un outil fondamental pour favoriser et personnaliser la croissance d’un milieu,  sans compter qu’il est intimement lié à son histoire et à son évolution. Sa conservation et sa mise en valeur doivent nécessairement être au cœur de toute vision du développement futur d’une collectivité.

Ainsi, le patrimoine constitue une composante majeure de tout processus de revitalisation socio-économique où sont pris en compte le développement des commerces et services, le renforcement de la vitalité socioculturelle et l’amélioration du cadre de vie.

Outre l’importance de bien répondre aux besoins des citoyens par une offre d’activités, de biens et services, il demeure essentiel de se préoccuper de la qualité et de l’identité de nos environnements bâtis.

L’identité, la personnalité, de notre milieu de vie est faite d’un ensemble d’éléments : sa géographie (la présence d’une rivière, par exemple), la nature qui l’entoure (la végétation, les parcs, etc.), la trame de ses rues ainsi que ses bâtiments qui témoignent de son histoire et de son évolution.

Les constructions de nos villes et de nos villages sont uniques. Elles sont d’époques, d’influences et de styles différents. Aussi le fait de les conserver en respectant leurs caractéristiques propres, et de les mettre en valeur, représente-t-il un atout pour le développement d’une municipalité et non une contrainte.

Plutôt que de poursuivre la banalisation et l’uniformisation de l’architecture de nos bâtiments, qui nous coupent d’une richesse unique, pourquoi ne pas miser sur l’affirmation de notre différence ? Cela, en mettant en valeur les particularités de nos édifices et de tout ce qui fait la personnalité de chacun de nos milieux anciens. Voilà qui contribuerait à une croissance intelligente, à un développement durable et à l’amélioration progressive de notre qualité de vie. 

François Varin, architecte et directeur de la Fondation Rues principales de 1985 à 2012.

Voir aussi « En mode réussite »

Cet article est disponible dans :

Habiter un milieu ancien. Bienvenue aux passionnés

Automne 2021 • Numéro 170

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