Sous le signe du poisson
Paul-Louis Martin, historien et ethnologue
D’où vient l’engouement des Québécois pour la pêche sportive ? De l’émerveillement des colons devant le spectacle des eaux poissonneuses jusqu’à la création des zecs, Continuité vous propose une histoire condensée qui saura vous appâter.
Juin 1951. À Trois-Rivières. Ce premier samedi s’annonce beau et chaud. Toute ma famille s’en va à la pêche, en pique-nique. On est fin prêt : on achève de remplir la voiture, une Ford toute neuve qui fait la fierté de mon père. Paniers de pique-nique, chaises pliantes en bois fabriquées chez Clément & frères, cannes à pêche et coffret en tôle verte où sont rangés les moulinets, les leurres et les hameçons, frigo Coleman rempli à ras bord, rien ne manque. Qu’est-ce qu’on attend? Arrivent enfin les autres membres de l’équipée, l’oncle Charles avec cousin et cousine dans sa petite voiture grise, une Nash, toute neuve elle aussi, puis, l’oncle Camil et tante Thérèse, fidèles compagnons de pêche et de sorties en nature. On se met en route, en file indienne. Direction ce jour-là : les chutes et le barrage de Saint-Narcisse, sur la rivière Batiscan. À peine arrivés, les hommes, et aussi tante Thérèse, vont tirer une ligne au pied des chutes et taquiner truites, dorés, brochets et autres peuples des remous, pendant qu’on s’installe pour la journée à grignoter, à se chamailler et à courir autour des petits bassins qui bordent le rivage, sous l’œil vigilant de nos mères. Un prochain samedi ou un beau dimanche de l’été, nous irons cette fois aux chutes de Sainte-Ursule, aux chutes «à Murphy», plus tard au barrage de La Gabelle, sur la Saint-Maurice, ou même aux Grandes Piles, près de Mékinac. On ira aussi en famille pêcher la truite en juillet au club Capitanal. Et partout, on y trouvera d’autres pêcheurs, d’autres familles qui s’adonnent en même temps que nous et avec autant de bonheur aux nouveaux loisirs de la pêche sportive et des excursions en nature.
Avec le recul du temps, on peut se demander aujourd’hui d’où venait ce qui semblait être alors une véritable frénésie de découvertes? D’où provenait donc cet intérêt pour le sport de la pêche? Et pour l’appropriation de la nature, la fréquentation de ses accidents topographiques et de la mise en scène spectaculaire de ses forces? La réponse spontanée, immédiate, étroitement liée au contexte de cette période est celle-ci : le regain économique de l’après Deuxième Guerre a profité à des milliers de famille qui ont vu leur revenu augmenter considérablement au point de pouvoir s’offrir une première voiture, de profiter d’une invention toute récente, le congé de fin de semaine, en somme d’entrer peu à peu dans une société des loisirs et d’accéder à leur tour à des activités et des lieux jusque-là réservés aux mieux nantis de la société. Il faut cependant remonter plus loin dans le temps pour repérer l’origine et la modification de nos rapports à cette généreuse nature qui avait tant séduit les premiers colons.
Des eaux avant tout nourricières
Nos ancêtres étaient loin d’être insensibles à la beauté du fleuve et de ses rivières : dans les textes de Jacques Cartier ou Bougainville, en passant par ceux de Champlain, Pierre Boucher, La Hontan, les Jésuites et la plupart des auteurs des XVIIe et XVIIIe siècles, on ne trouve qu’étonnement et admiration devant le spectacle d’autant de grandes eaux, si vives, si poissonneuses et fréquentées par autant d’oiseaux migrateurs. Mais l’époque ne fait guère de place à la contemplation de la nature, encore moins aux loisirs en plein air, sauf chez les détenteurs de titres et de privilèges. La préoccupation dominante chez la plupart des habitants et des besogneux de tout poil reste le primum vivere, c’est-à-dire se nourrir, s’abriter et installer durablement sa famille dans ce pays au climat capricieux.
Les nouveaux venus pourront compter sur les abondantes ressources halieutiques de cet immense réseau d’eau douce. Dans une société en construction, de foi catholique bien entendu, qui inscrit à son calendrier annuel pas moins de 140 jours de jeûne (cinquante-deux vendredis, quarante jours de Carême, les Avents et autres veilles de fêtes), on peut considérer comme une vraie bénédiction l’accès à une telle manne : anguilles, esturgeons, saumons, bars, aloses, dorés forment la majorité des captures que font les habitants dans leurs pêches à fascines autour et en bas de Québec. Plus haut dans l’estuaire, hors de la zone de marées, on prend au filet, dans les nasses, à la foëne ou à la ligne dormante brochets, maskinongés, barbues, carpes, perchaudes, aloses, anguilles et saumons encore, tandis que dans le bas du fleuve, en eaux salées, s’ajoutent harengs, morues, loches, éperlans et capelans.
Les vedettes : l’anguille et le saumon
Outre la morue, qui occupe une place capitale et unique, deux poissons ont joué un rôle plus important que les autres : l’anguille et le saumon. La première était familière aux immigrants issus de la Bretagne et de la Vendée, qui ont transposé ici leurs techniques de pêche, soit les barrières de fascines dotées de bourroles et de coffres. Présente en quantité prodigieuse, l’anguille était facile à capturer lors de sa migration automnale. Dans les années 1650, elle a pratiquement sauvé la petite colonie française de la famine. Salée et mise en barrique, elle a fait partie du régime alimentaire de presque tous les habitants des deux rives du fleuve jusqu’au milieu du XXe siècle. On appréciait sa chair grasse et délicate qu’on apprêtait en ragoût ou en tronçons grillés sur les braises.
Avant d’accéder au statut de poisson à valeur sportive, le saumon a quant à lui fait l’objet d’une exploitation considérable dans tout l’espace laurentien. On ne peut évaluer avec précision les quelques dizaines de rivières à saumon, des deux côtés du fleuve, qui ont été mises en production à un moment ou l’autre de l’ère pré-industrielle. Qu’il suffise de mentionner les faits suivants : les deux rivières à saumons les plus productives sur la rive sud du Saint-Laurent étaient la Châteauguay et surtout la Saint-François, selon ce qu’a rapporté avec grand étonnement l’ingénieur du roi Louis Franquet, lors de sa visite en 1754. À compter de 1768, les captures de saumons de la spectaculaire rivière Jacques-Cartier ont souvent été la cause de mésententes sur les redevances (sixième ou onzième baril ?) entre le seigneur Joseph Brassard-Deschenaux et ses censitaires. Selon Richard Nettle, premier surintendant des pêcheries, le dernier saumon de la rivière Saint-Charles, en pleine ville de Québec, a été capturé en 1865, alors que le salmonidé disparaît aussi de la rivière Sainte-Anne, à La Pérade, au cours de la même décennie.
Salé et mis en barrique, le saumon était écoulé sur les marchés locaux. Il figurait au menu des malades de L’Hôtel-Dieu de Québec, mais on l’a aussi exporté aux Antilles et dans la mère patrie tout au long du Régime français, puis en Angleterre après la Conquête, jusqu’à ce que de sérieuses menaces commencent à affecter la santé de son habitat, au milieu du XIXe siècle. Lorsque le premier surintendant des pêcheries du Canada-Uni entre en fonction, en 1855, l’une de ses tâches consiste à assurer l’inspection régulière des rivières à saumons mises à mal par l’industrialisation croissante. Barrages, manufactures et moulins empêchent la remontée des saumons vers leurs frayères, sans compter deux autres facteurs négatifs : les tas de bran de scie que les scieries jettent dans les cours d’eau et le harponnage des saumons par les braconniers, trop heureux de darder nuitamment les poissons rassemblés dans les fosses, au pied des barrages. Le beau salmonidé allait toutefois connaître un destin moins commun que les poissons pêchés de façon industrielle : il allait participer à la naissance d’une autre forme de pêche au Québec.
Un loisir tardif
La pêche pratiquée comme un loisir ou un sport est probablement plus récente que la chasse. Le mot « sport » provient d’ailleurs d’un mot français du XVe siècle, « à desporter », qui signifie « s’amuser en plein air d’un jeu ou d’un passe- temps ». Plus connu et célébré, le loisir de la chasse est pratiqué par les aristocrates dans leurs forêts domaniales, il représente l’essence de la notion de sport dans les anciens régimes monarchiques, un peu partout en Occident. Cette chasse dite de loisir, principalement aux oiseaux migrateurs, a été largement pratiquée en Nouvelle-France surtout par les militaires et les seigneurs d’origine aristocratique à qui on en faisait miroiter l’accès illimité dans les textes de propagande diffusés en France (Martin; 1990).
Il en va tout autrement de la pêche : malgré le fait que le premier dictionnaire de l’Académie française en 1694 la décrive aussi comme « une forme d’amusement et de diversion », on ne trouve aucune mention claire de pêche sportive en Nouvelle-France, ni même avant le début du XIXe siècle. L’étude récente la plus fouillée sur l’origine et l’évolution de cette pêche au Québec, Fashioning a Freshwater Eden: Elite Anglers, Fish Culture, and State Development of Québec’s Sport Fishery, réalisée par Darin Kinsey en 2008, n’a permis de relever aucune mention d’objets dans les documents notariés ni témoignage écrit concernant une telle activité de loisir.
On ne trouve pas davantage d’indices d’un loisir à propos des pratiques usuelles de pêche des Amérindiens. Nigogs, hameçons taillés dans un os, nasses tressées et barrages de pierres servaient à capturer le maximum de poissons pour s’en nourrir, relate le jésuite Antoine Silvy dans un texte de 1709. Pour augmenter leur récolte, les autochtones ont mis au point la pêche nocturne au nigog et au flambeau : une torche fixée à l’avant du canot attirait autour les saumons, truites, anguilles et esturgeons que l’on capturait alors en très grand nombre. Les braconniers des siècles suivants ne se sont pas privés de reprendre la technique.
Si on peut repérer dans la littérature française quelque mention, plutôt timide, du loisir de la pêche, comme dans «Les ruses innocentes» de François Fortin, publié à Paris en 1661, et dont le sous-titre décrit «un ouvrage très curieux, utile et récréatif pour toutes personnes qui font leur séjour à la campagne», il reste que c’est du côté de l’Angleterre qu’il faut se tourner pour apprendre dans un livre remarquable la véritable nature, proprement décrite et presque déjà codifiée, du moins socialement, de la pêche sportive.
L’auteur Izaak Walton, après avoir fait fortune dans le commerce du fer, se retire des affaires et passe le reste de son existence à approfondir l’art de la pêche à la mouche et à publier les résultats de ses expérimentations. Parmi ses nombreuses publications, il faut surtout retenir «The Compleat Angler» un guide en format de poche, publié à Londres en 1653, qui va littéralement devenir au cours des siècles suivants la «Bible» de ce sport. Le sous-titre du petit livre «the Contemplative Man’s Recreation» ne laisse aucun doute sur l’orientation plutôt élitiste de sa conception de la pêche, d’autant qu’il précise ensuite que «les rivières et les habitants de toutes les eaux n’ont été créés que pour la contemplation des hommes sages, que les fous passent outre sans autre considération» (ma traduction). C’est en s’inspirant de cette bible que les Anglais s’approprient leurs rivières, puis transposent dans leurs colonies leur passion de la pêche à la mouche. Après avoir taquiné saumons et truites dans la Tamise, la Trent, la Severn, l’Eden et les dizaines d’autres rivières anglaises, voici que cent cinquante ans plus tard les disciples de Walton découvrent au Bas-Canada une rivière à saumon absolument exceptionnelle la Jacques-Cartier.
En 1804, un pont à péage en bois de charpente réunit les rives les plus rapprochées de la rivière Jacques-Cartier, à la hauteur de l’actuelle ville de Pont-Rouge, facilitant la circulation sur le chemin du Roy. Or, il y a là des cascades, des gorges et des fosses profondes dans lesquelles se reposent les saumons qui, en saison, vont frayer plus haut sur le lit graveleux de la rivière. Succédant aux Amérindiens, les habitants des lieux y ont longtemps tendu leurs filets avec grand succès, au point, comme on l’a souligné plus haut, d’inciter le seigneur de Neuville à y mettre de l’ordre. Mais depuis déjà quelques années, des officiers britanniques de la garnison de Québec, disciples avoués de Walton, ont repéré les meilleures fosses de pêche à la mouche près de la maison du péager François Pommereau. Au décès de celui-ci, sa veuve commence à offrir à ces militaires passionnés des services d’hébergement, inaugurant une tradition d’accueil et de pourvoirie qui sera ensuite maintenue par la famille Déry jusqu’en 1913. Un jeune officier anglais, Frederic Tolfrey, séjournant à Québec en 1816-1818, nous a laissé un témoignage fort bien documenté de ses séjours de pêche très productifs, toujours gourmands et bien arrosés, chez la veuve Pommereau. Les récits de ses captures « fabuleuses » de saumons et de ses autres excursions sportives, soit à la pêche au maskinongé, soit à la chasse au canard ou à la bécassine, il les a publiés à Londres en 1845 sous le titre « The sportsman in Canada ». Ce volume, que j’ai eu plaisir à traduire, a été publié en 1979 sous le titre « Tolfrey, un aristocrate au Bas-Canada ».
Le site de pêche Déry est délimité, loué par bail en 1818 et réservé en exclusivité à des militaires et des bourgeois de Québec, si bien qu’on peut le considérer comme l’un des premiers clubs privés de pêche au saumon du Québec. Le dernier détenteur des droits de pêche sur cette rivière sera le maître brasseur québécois de la bière Dow, Joseph Knight Boswell. (Le «Roi des eaux vives» qui était disparu de la rivière depuis la construction du barrage de Donnacona, en 1913, y a été réintroduit avec succès en 1985, grâce aux travaux du Comité de restauration de la Jacques-Cartier).
L’essor des clubs privés
La formule du club privé sera reprise au long de la rivière Matapédia en 1871, puis en Gaspésie, alors que le gouvernement fédéral vendra ou cédera par bail les droits de pêche au saumon à de riches concessionnaires, majoritairement d’origine américaine. Mais l’essor véritable de ce type de concessions survient après 1882, lorsque le gouvernement du Québec se fait confirmer par la Cour suprême sa juridiction exclusive et ses droits de pêche sur les eaux intérieures, soit les lacs et rivières non navigables de son territoire.
Le moment est bien choisi pour répondre favorablement aux nombreux groupes de chasseurs et de pêcheurs qui, depuis 1880, demandent au gouvernement de leur concéder une réserve privée dans ces espaces forestiers maintenant accessibles par chemin de fer. Le gouvernement de Joseph-Alfred Mousseau poursuit un triple objectif : satisfaire les loisirs des membres de l’élite financière, tirer un revenu de la location du territoire public et de ses ressources, et s’assurer de la conservation du poisson et du grand gibier. Car depuis plusieurs années, le gouvernement échoue à freiner les prélèvements sauvages d’orignaux, de caribous et de poissons dont les habitats sont envahis par de nouvelles vagues de colons et d’exploitants forestiers (Martin;1990). Voilà pourquoi la loi créant la formule locative du club se lit ainsi : « Acte pour faciliter la formation en cette province de clubs pour la protection du poisson et du gibier ». Adoptée en 1885 (SRQ,48 Vict.c.12,art.5493), elle vient régulariser la situation de deux concessions, les clubs Winchester et Shawinigan, et poser les conditions des futures locations de territoire.
En moins de 10 ans, plus de 50 clubs voient le jour. Après 20 ans, on en compte 300, puis 500 en 1923. La superficie du territoire concédé diminuera progressivement avec le nombre de clubs, passant de 300 mi2 (777 km2, soit plus d’une fois et demie la superficie de l’île de Montréal), comme au Triton Fish and Game Club en 1893, à une moyenne de 100 mi2 (259 km2). Après 1950, sous le régime de Duplessis, cette superficie sera parfois réduite à un secteur de cinq ou six lacs pour satisfaire les groupes moins fortunés.
Puisque l’un des objectifs officiels est de protéger la faune marine et le gibier, les locataires sont tenus de respecter les lois et règlements liés à la faune, de consigner toutes leurs prises et captures dans le rapport de leurs activités et de le transmettre annuellement au ministère responsable. Les clubs doivent surtout mettre en place un système de gardiennage, permanent dans certains cas, dont les gardiens seront longtemps considérés comme investis du statut et des pouvoirs des gardes-chasses et gardes-pêches officiels.
Chaque club compte en moyenne une cinquantaine de membres qui se partagent le loyer annuel du territoire, fixé à 100 $ au début du système, puis augmenté à 3 $ le pied carré en 1914. Le coût de la cotisation annuelle varie selon les volontés des directeurs du club, mais il ne convient qu’à des goussets bien garnis. Les deux premiers clubs autorisés par le nouveau régime, le Club Shawinigan en 1883 et celui des Laurentides en 1885, rassemblent l’un les financiers, les industriels et les politiciens de Montréal, l’autre ceux de Québec. On ne s’étonnera pas de voir ces clubs recruter peu à peu la majorité de leurs membres parmi les élites financières et politiques américaines et canadiennes-anglaises. L’auteur de l’histoire du célèbre Triton Fish and Game Club, Sylvain Gingras, a repéré parmi ses membres les principaux capitaines d’industries états-uniennes, les Colgate, Vanderbilt, Rockefeller, Henry Sanford, Charles T. Church et autres, ainsi que des figures politiques telles que le président Theodore Roosevelt et le gouverneur général du Canada Earl Grey. Presque tous les premiers ministres du Québec ont à leur tour fréquenté l’un ou l’autre des confortables club houses de ces paradis forestiers. D’où les noms « Clubs des Américains » donnés par la population locale à ces domaines quasi seigneuriaux fréquentés par les « messieurs » et les « sports » venus de la grande ville.
Nouveau régime
Avec l’amélioration des conditions de vie de la classe moyenne après la Seconde Guerre mondiale se multiplient les adeptes des loisirs en nature. Le nombre de clubs de chasse et pêche, qui avait stagné en raison des deux guerres et de la crise des années 1930, connaît lui aussi une progression étonnante entre 1945 et 1960 : il passe de 614 à 1908. La superficie moyenne, elle, est ramenée à 13,5 mi2.
Au début des années 1970, la colère gronde : les 1991 clubs fréquentés par 30 000 membres mécontentent profondément les 500 000 détenteurs de permis de pêche et de chasse, privés d’une grande partie de leur terrain de jeu. Le « scandale des clubs privés », selon les mots du journaliste Henri Poupart, soulève les passions et donne lieu à des manifestations publiques, qui conduisent le Parti québécois à promettre l’abolition du régime dans son programme électoral de 1976. Deux ans plus tard, le régime presque centenaire est aboli. Il cède la place à un mode de gestion plus démocratique : les zones d’exploitation contrôlée (zecs), ouvertes à tous et dotées de moyens scientifiques de conservation des milieux naturels. Depuis lors, si on ajoute l’accès aux parcs et réserves ainsi qu’aux pourvoiries, c’est près de 700 000 Québécois qui se procurent un permis de pêche sportive chaque année et profitent des ressources fauniques de leur grand fleuve et de leurs milliers de lacs et de rivières.
L’histoire a construit chez nous un parcours unique, assez fidèle au type de rapports à la faune marine qui ont circulé dans la société, ces quatre derniers siècles. Nécessité faisant loi, les eaux poissonneuses du fleuve et des rivières ont d’abord servi à nourrir nos populations avant de leur procurer des moments de loisirs, ou de « contemplation », selon Isaak Walton, cet auteur anglais du XVIIe siècle, dont la passion pour la pêche à la mouche nous a été transmise par l’influence culturelle que nous avons partagée avec ses propres disciples. Cette passion pour la pêche, ainsi que l’appropriation des magnifiques paysages forestiers du pays, elles ont été trop longtemps réservées aux élites financières et aux mieux nantis, d’ici et d’ailleurs, mais elles ont fini, grâce à un réflexe démocratique exemplaire, par enfin bénéficier à l’ensemble des propriétaires du pays.
VOLUMES CITÉS
Kinsey, Darin. Fashioning a Freshwater Eden : Elite Anglers, Fish Culture, and State Development of Québec’s Sport Fishery. Thèse de Doctorat en Études québécoises. No 196. UQTR. Avril 2008. 320p.
Martin, Paul-Louis. La chasse au Québec. Montréal, Éditions du Boréal, 1990. 409p.