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Colloque Action patrimoine 2023

Depuis de nombreuses années, Action patrimoine organise des événements pour les professionnels du patrimoine. Ici, le colloque Choisir la voie durable, en 2023 à Saint-Camille. | Photo : Simon Laroche

Action patrimoine : 50 ans d’actions

La chronique Point de mire reflète la position d’Action patrimoine dans certains dossiers chauds. Ce printemps, l’organisme revient sur ses 50 ans au service de la préservation du patrimoine bâti et des paysages culturels du Québec.

En 2025, Action patrimoine célèbre ses 50 ans d’existence, un demi-siècle d’engagement et d’actions ! Depuis sa fondation en 1975, l’organisme a grandi, évolué et changé avec un même fil conducteur : démontrer l’importance du patrimoine bâti et des paysages culturels du Québec. Alors que ce 50anniversaire symbolise une ouverture sur l’avenir et les défis des prochaines années, Action patrimoine revisite les moments marquants de son histoire.

Peut-être avez-vous connu l’organisme sous son nom d’origine : le Conseil des monuments et sites du Québec (CMSQ). C’est sous cette appellation qu’il voit le jour en 1975, dans un contexte historique où la nécessité de sensibiliser la population et les acteurs du milieu au patrimoine bâti prend de l’ampleur au Québec. Les années 1970 marquent une décennie de modernisation et de renouveau, durant laquelle de nombreux bâtiments patrimoniaux sont détruits pour répondre aux besoins de l’époque, notamment liés au développement urbain. À Québec, lors de la transformation de la colline Parlementaire, la disparition de maisons victoriennes sur la Grande Allée fait grand bruit. En effet, le gouvernement du Québec procède à leur démolition pour faire place, notamment, au complexe formé des édifices J et H, mieux connu sous le nom de « bunker », aujourd’hui considéré comme un ensemble emblématique.

En réaction aux vagues de démolitions de bâtiments patrimoniaux, plusieurs organismes voient le jour. Pour Action patrimoine, c’est l’alliance de l’archéologue Michel Gaumond, de l’historien de l’art Yves Laliberté et de l’architecte et urbaniste André Robitaille qui en pose les bases. 

Constitué dès sa création comme un organisme à but non lucratif, il avait sensiblement les mêmes objectifs qu’aujourd’hui. Cependant, il y a 50 ans, beaucoup restait à accomplir. L’objectif était de rassembler des historiens, des architectes, des urbanistes et d’autres passionnés de patrimoine afin de faire front commun face aux enjeux et aux problématiques liés à ce domaine et de mener des actions concrètes sur le terrain.

 

Les dossiers phares

L’organisme œuvre notamment dans la reconnaissance légale du patrimoine, contribuant à l’évolution des lois pour mieux le protéger et inciter les autorités locales à s’investir pour sa conservation. Au fil du temps, il se positionne comme un conseiller, non seulement pour les citoyens, mais également pour les élus, les gouvernements et les professionnels du milieu.

Parmi les dossiers marquants des débuts de son histoire, on peut citer le soutien du CMSQ auprès de la Ville de Québec pour que celle-ci obtienne le titre de ville du patrimoine mondial, un concept novateur dans les années 1980. Depuis sa création, l’organisme traite de nombreux dossiers chaque année, portant sur des bâtiments ou des paysages culturels en péril.

Voici quelques exemples succincts de notre implication au fil des décennies. Le CMSQ a soutenu et suivi le dossier de la sauvegarde du domaine Joly-De Lotbinière, dans la municipalité de Sainte-Croix. Rappelons aussi la lutte acharnée pour protéger le front fluvial à Québec et dégager la vue de la ville sur le fleuve. Dans les années 1980, il était question d’ériger des condos à la Pointe-à-Carcy. À cette époque, la notion de paysage culturel patrimonial était nouvelle. C’est seulement en 2012 qu’elle sera intégrée à la Loi sur le patrimoine culturel, portée, entre autres, par Action patrimoine.

En plus de son implication dans des dossiers chauds, l’organisme diversifie son champ d’action en participant à divers événements destinés aux professionnels du milieu ou en créant les siens. L’arrivée de Mme France Gagnon Pratte en 1985 donne un nouveau souffle à l’organisme. Son amour du patrimoine et sa connaissance en la matière incitent l’organisme à se lancer dans de nouvelles batailles. Par exemple, à partir de 1987, le CMSQ prend part à toutes les consultations gouvernementales sur la création d’une politique du patrimoine.

 

Pour remplir pleinement notre mission, nos actions reposent sur trois piliers : sensibilisation, éducation et intervention.

En 1994, la Fondation québécoise du patrimoine est créée. Sa mission consiste à promouvoir la conservation et la mise en valeur du patrimoine bâti et des paysages culturels du Québec en soutenant financièrement, en premier lieu, le CMSQ, les éditions Continuité et la maison Henry-Stuart. Elle est, encore aujourd’hui, un soutien indéfectible à la réalisation de notre mission.

En 1997, le CMSQ fait l’acquisition de la maison Henry-Stuart à Québec, classée immeuble patrimonial, où ses bureaux sont toujours installés. En tant qu’organisme prônant la sauvegarde du patrimoine bâti, nous nous faisons un devoir d’être exemplaire dans la préservation de notre bâtiment. En plus des grands travaux de restauration effectués lors de l’acquisition, nous procédons annuellement à des travaux préventifs. En 2024, avec l’aide financière de la Ville de Québec, nous avons entamé le Plan de décarbonation, projet qui se poursuivra dans les prochaines années. Enfin, les années 2000 ont aussi eu leur lot de dossiers marquants pour la défense du patrimoine, notamment en ce qui a trait aux démolitions par abandon ou négligence. Nous pouvons citer la maison Bignell à Québec, abandonnée depuis les années 1970, et le domaine de l’Estérel, dans les Laurentides, pourtant classé par le ministère de la Culture et des Communications mais démoli sans permis. En 2012, le CSMQ adopte le nom Action patrimoine (architecture et paysages du Québec), reflétant un engagement plus ancré dans l’action. Toutes les décennies ont leurs défis, mais la sensibilisation reste sans équivoque le nerf de la guerre.

 

Être dans l’action !

La volonté de l’organisme de sensibiliser et de vulgariser se traduit très tôt par la création du magazine Continuité en 1982, qui demeure le seul magazine québécois entièrement consacré au patrimoine. Bien qu’ils soient désormais indépendants, les deux organismes sont restés très liés en tant que partenaires.

En plus des dossiers quotidiens pour préserver des bâtiments, des ensembles patrimoniaux ou des paysages culturels, l’organisme joue un rôle de premier plan dans les nombreuses consultations et à diverses tables. Notre rôle de conseiller, de représentant du milieu et notre expertise nous ont permis de tisser des liens avec diverses instances pour ainsi nous assurer de porter la voix du milieu.

Nous tenons à souligner notre implication dans certains dossiers politiques, de même que le dépôt de mémoires, dont celui dans le cadre de la consultation publique en vue du renouvellement de la politique culturelle du Québec.

Action patrimoine a contribué au domaine législatif en agissant à titre d’expert en patrimoine lors de modifications apportées à la Loi sur le patrimoine culturel ou lors de l’élaboration de nouveaux projets de loi. En réponse au constat du rapport sur le patrimoine immobilier du Vérificateur général du Québec en 2020, le projet de loi numéro 69, Loi modifiant la Loi sur le patrimoine culturel et d’autres dispositions législatives, est mis sur pied.

Ces modifications octroient davantage de pouvoir aux villes, municipalités et municipalités régionales de comté (MRC) en matière de protection et de gestion du patrimoine tout en les obligeant à adopter des réglementations. À titre d’organisme de regroupement, Action patrimoine intervient auprès de la Commission de la culture et de l’éducation lors des Consultations particulières et auditions publiques sur ce projet de loi pour formuler ses recommandations et porter la voix du milieu. Les formations d’Action patrimoine sont d’autant plus importantes avec les changements qui s’opèrent. En effet, la formation des élus, du personnel municipal et des diverses instances s’avère essentielle. Le travail de réflexion doit se faire en amont afin d’agir concrètement pour la préservation du patrimoine.

Enfin, au cours des dernières années, l’organisme a siégé au Comité consultatif de la Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire, mené par le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation.

 

Tourné vers l’avenir

Aujourd’hui reconnu comme organisme de regroupement en patrimoine bâti par le ministère de la Culture et des Communications, nous collaborons étroitement avec le milieu en proposant une approche concrète du patrimoine, à la fois nationale et locale.

Pour remplir pleinement notre mission, nos actions reposent sur trois piliers : sensibilisation, éducation et intervention. Au quotidien, cela se traduit notamment par la représentation du milieu auprès des différents paliers gouvernementaux, des prises de position concernant des cas d’actualité, des formations, des colloques et d’autres activités.

Action patrimoine tient à saluer toutes les personnes ayant œuvré de près ou de loin avec l’organisme au cours des 50 dernières années (nos membres, nos bénévoles, nos partenaires, nos collaborateur(trice)s, ainsi que les membres du conseil d’administration et les employé(e)s). Un merci particulier aux fondateurs, à Mme France Gagnon Pratte pour l’ensemble de son implication, à Mme Louise Mercier, ayant occupé le poste de directrice et de présidente et dont l’implication cumule 40 ans, ainsi qu’à toutes les personnes ayant contribué au succès de l’organisme.

La relève est aujourd’hui présente, dévouée et motivée pour les 50 prochaines années ! Action patrimoine tiendra un sommet qui se veut rassembleur en septembre 2025 afin de réfléchir ensemble à des pistes de solution et à des idées constructives pour l’avenir. En espérant vous y accueillir en grand nombre ! ◆

Chloé Breton est responsable des positions et de la formation et Renée Genest est directrice générale d’Action patrimoine.

 

Cet article est disponible dans :

Patrimoine habité. Réinventer le logement

Printemps 2025 • Numéro 184

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